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le blog d'un hypnothérapeute

Ils nous ont mis une clôture !

Publié le 1 Mars 2014 par Jean-Luc ROQUET - Hypnothérapeute

Ce titre en exclamation exprime une frustration mêlée de dépit et de nostalgie, une injustice, lorsqu’arrivant à l’orée, nous constatons que l’accès au petit chemin des bois est fermé par une barrière.

C’est février, printanier jour d’hiver, la voiture patiente sur le parking de la plage de l’Embellie, « notre » plage, celle où nous avons déjà tant de souvenirs…

D’ordinaire, nous empruntons le sentier qui se perd sous les arbres. C’est un réflexe, depuis si longtemps, les initiés coupent pour rejoindre l’océan.

L’été, il y a comme un amusement teinté d’orgueil à disparaitre dans les fourrés, sous le regard incrédule des baignassous* qui, eux, suivent moutonnement l’allée de sable mou, mouvant, brulant, couloir conformiste sous les dards du cagnard. Nous, nous savons le confort de marcher au frais relatif, à l’ombre des pins maritimes. Les acacias nous connaissent, ils ont moult fois accroché leurs épines sur nos paniers et glacières. Nos sandales et tongs ont foulé souvent le grépin*, ce tapis d’aiguilles rousses, qui nous rend la marche aisée, parfois glissante. Au détour d’un virage, la sente sauvage revient narguer de derrière un barbelé la cohorte de familles ensablées, pour disparaitre à nouveau dans les profondeurs boisées. Ce n’est pas vraiment un raccourci, juste un plaisir qui nous dépose à plusieurs jets de parasols de l’entrée officielle, éloignés de la masse des peaux encore blanches ou déjà rougies.

Et voilà qu’aujourd’hui, aux premières lueurs de beaux jours futurs, notre chemin est clos de fer. La dernière fois pourtant, en début d’hiver, il était encore accessible.

Nous savons, bien sûr, les dernières tempêtes qui justifient cette décision. La dune est érodée, devenue falaise. Un géant aurait creusé, de son énorme cuillère, ce gâteau sableux pour n’en laisser qu’une part, abrupte. La plage a gagné en largeur ce que la forêt a perdu. Il est en effet nécessaire de protéger ce qu’il reste de colline.

N’empêche, que l’on nous prive de « notre chemin » nous calimérise (c’est trop injuste !). « Ils » exagèrent ! Pratique, ce pronom, pour désigner un respon-sable, vague-ment référent à une autorité étatique indéfinie… ça soulage sans accuser nommément.

Marchant le long de la grève, le soleil de face nous rend les autres promeneurs anonymes, tous sombres de mise, petits dans l’immensité de l’étendue, renforçant ce sentiment d’être les proprios de l’endroit, tolérant leur présence.

Puis, revenant sur nos pas, le vent se rappelle à nous, le visage est plus frais, et les voix des marcheurs que nous croisons nous parviennent plus fort. Nous distinguons alors les couleurs des gilets, manteaux, bonnets. L’illusion est rompue, nous redevenons de simples emprunteurs de joie salée, comme les autres. Cela nous ramène à notre juste place.

Quand même, revenus au parking, nous ne pouvons nous empêcher de chercher un autre accès, pour la prochaine fois…

Rebelles ? Oui, surement, première réaction.

Adaptatifs ? Bien sûr. Nous avons le choix, n’est-ce pas ? Sans doute est-il plus important de continuer à profiter de ce joyau que les terriens estivaux nous envient, en le préservant du mieux possible.

Il suffit d’ôter sa coquille d’œuf de sur la tête !

*Baignassous : mot charentais maritime (et un peu moqueur) désignant affectueusement les touristes

*Grépin : tapis de sol constitué des aiguilles de pins accumulées dans les forêts de landes, parfois glissant au point que l’on en faisait des pistes de ski dans les années 70

Ils nous ont mis une clôture !
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